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Partie I



TROIS PERSPECTIVES


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Olivier Auber


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Octobre 2007


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SOMMAIRE


Partie I - TROIS PERSPECTIVES
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Résumé

I.1. Perspective spatiale et cartographie physique


I.2. Perspective temporelle et cartographie interactive


I.2. Perspective numérique et cartographie sémantique


Suite...

Parties II - Trois régimes de légitimité

Parties III - Perspective et territoire


Copyright © 2007 Olivier Auber Copyleft



RESUME


Partie I - TROIS PERSPECTIVES

Résumé

Trois perspectives à la fois concurrentes et se nourrissant les unes les autres sont à l’oeuvre aujourd’hui:




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Perspective spatiale et cartographie physique


Partie I - Trois perspectives

Voici quelques 600 ans [..] avec l’invention de la perspective, le tableau de paysage devient la norme de la perception de ce qui nous entoure. [...] Elle ne semble plus convenir à la perception d’un monde que les nouvelles technologies de la communication ont bouleversé. Anne Cauquelin

Perspective spatiale et cartographie physique

Cohérence des choses

À la Renaissance, nous avons commencé à voir "en perspective". Nous avons pris l'habitude d'évaluer les distances qui séparent les lieux les uns des autres, par plans successifs, du plus proche au plus lointain. Nous avons admis que les règles de construction géométrique de la perspective dite "légitime" déterminaient la taille relative des objets suivant leur distance au point de vue. Nous avons intégré au plus profond de notre culture que toute représentation devait être structurée relativement à un point de fuite situé à l’horizon.

La perspective reliait le temps à l'espace, au sens où, étant capable d'estimer les distances entre plans, on évaluait aussi la durée du voyage nécessaire pour se rendre d'un lieu à un autre. Ainsi, la perspective spatiale, calquée sur notre perception visuelle, nous donnait le sentiment de l’unité et de la cohérence des choses dans un espace et un temps conçus comme linéaires.

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Partie I - Trois perspectives

Perspective spatiale et cartographie physique

Industrie de l'Espace

Filles (ou sœurs) de la perspective, la cartographie physique, la géodésie et la géométrie descriptive sont venues compléter le cadre général d'action permettant d'optimiser l'espace habité aux contraintes de déplacement des hommes et des biens. Ces outils ont constitué le principal moteur du phénomène d'urbanisation qui, agissant pendant des siècles, a abouti à nos villes et agglomérations actuelles.

Longtemps, les villes ont été les points de fuite de tout un ensemble d’« industries de l'espace» à la racine desquelles étaient l'agriculture, le commerce pour échanger les denrées, l'armée et la fiscalité pour les défendre.

 meridein

Mesure d'un arc de méridien depuis Dunkerque jusqu'à Barcelone, Delambre et Méchain, 1792 à 1798. Source: Wikipédia

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Perspective temporelle et cartographie interactive


Partie I - Trois perspectives

Perspective temporelle et cartographie interactive #1

Instantanéité

Une invention est venue perturber le bel ordonnancement: c'est le télégraphe - optique pour commencer -, puis électrique. A cause de lui, nous sommes confrontés depuis seulement un siècle et demi environ à un phénomène sur lequel la perspective classique n'offre plus de prise, car il l'implique totalement: il s'agit de l' instantanéité des télécommunications.

Autrefois corrélés, le temps et la distance ne le sont plus. Pour représenter une population, on créait simplement une carte de son territoire physique. Dés lors que les télécommunications ont existé s'est posée la question: comment peut-on réaliser une représentation légitime d'un collectif dispersé et communicant à la vitesse de la lumière?

La solution a consisté à installer des points particuliers dans l’espace, typiquement des émetteurs-récepteurs, afin d’agréger de les informations issues du collectif et les redistribuer vers chacun. Un centre de commandement militaire, un émetteur de radio ou de télévision exécutent ce type de tâche dans une certaine mesure.

Après ces balbutiements, le Web tel que nous le pratiquons aujourd'hui apparaît comme le modèle même d’un système fonctionnant suivant une nouvelle perspective qui admettrait ce type d’émetteurs-récepteurs comme " points de fuite".

 FAI

Carte topologique du coeur d'un réseau d'un F.A.I.
Source: Govindan, Reddy, Institut des Sciences de l'Information , USA.


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Partie I - Trois perspectives

Perspective temporelle et cartographie interactive #2

Temps subjectif

L' Internet Protocol dans sa version 4 (IPv4), définit en effet une collection de centres dont aucun n'est prééminent, du moins en théorie. Pour communiquer à plusieurs, a fortiori instantanément, un groupe doit accepter de passer par l'un de ces centres, qui de ce fait, n'est plus équivalent aux autres. Il émerge ainsi une hiérarchie des centres. Petit ou grand, chacun d’entre eux est le point de fuite de la construction de la représentation du groupe qui l'utilise suivant le schéma d’une perspective temporelle.

Pourquoi cet adjectif "temporelle" cette fois? Parce que dans le cadre d’une interaction instantanée, comme c’est de plus en plus le cas, c'est au niveau de l'émetteur-récepteur qu' émerge au fur et à mesure qu'il reçoit l'information de tous, la représentation et le temps propres du groupe, à la résolution près de son horloge interne.

Le temps dont il s’agit ici n’est plus le temps linéaire corrélé à la distance suivant le schéma de la perspective spatiale ; il s'agit d'un temps subjectif construit au gré de l' interaction du groupe relativement au centre qu’il choisit, ou qui lui est imposé, pour s’actualiser.


 TwitterVision

TwitterVision 3D
Source: twittervision.com


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Partie I - Trois perspectives

Perspective temporelle et cartographie interactive #3

Autres territoires

La " cartographie interactive", qui propose sous une forme ou une autre une interactivité collective immédiate relativement à un référentiel, fonctionne suivant le schéma de perspective temporelle. Elle percute les logiques territoriales et les centres habituels puisqu'elle permet à des groupes répartis d’exister, c’est à dire de se représenter ou d’être représentés à leur insu, indépendamment de leur localisation physique. Mais il faut bien observer qu’elle le fait simplement en attachant le groupe à un nouveau centre, en l'occurrence à un serveur, et donc à une infrastructure matérielle située ici ou ailleurs, sur un autre territoire .

La perspective temporelle produit donc une sorte de déplacement de territoire, et donc une perte d'influence des anciens centres au profit de nouveaux. En matière de cartographie, cette concurrence s'observe dans la bataille que se livrent les GoogleMaps, Live.com, ViaMichelin, Géoportail et beaucoup d'autres, qui luttent pour assurer leur sphère d'influence.

Avec l’irruption de la perspective temporelle, des pans entiers des " industries de l'espace" sont en train de muter en " industries du temps". Selon la conjecture perspectiviste, le succès relatif des uns et des autres sera largement tributaire du caractère «légitime» - ou pas - de la perspective temporelle que ces industries mettent en œuvre, et de leur capacité de mutation en regard d’une troisième perspective: la perspective numérique.

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Perspective numérique et cartographie sémantique


Partie I - Trois perspectives

Perspective numérique et cartographie sémantique #1

Fin des opérateurs

A peine, nous sommes-nous habitués à la pratique du Web, à la fréquentation de ses serveurs et à la cartographie interactive, qu'une autre invention surgit, qui elle, promet effectivement d’affranchir le réseau de tout ancrage territorial. Ses prémices s'appellent P2P, GridComputing ou SwarmComputing déjà mis en oeuvre dans une première vague de réalisations industrielles ou de recherche telles Seti@home, BitTorrent, Skype, Joost, etc. qui suppriment déjà dans une certaine mesure la notion de centre au sens de la perspective temporelle.

Cette première vague en annonce une seconde qui serait en mesure de les supprimer complètement et d’en créer de nouveaux d’une toute autre tournure. Par exemple Hadoop, Navizon ou TerraNet transforment chaque terminal (un simple téléphone mobile par exemple) en un routeur de tous les autres avec lesquels ils sont directement reliés par radio de proche en proche selon le principe des réseaux Mesh.

Ces systèmes fonctionnant par voie hertzienne, vont dans l'absolu jusqu'à supprimer les opérateurs de télécommunication dont on sait à quel point leurs infrastructures sont historiquement reliées aux territoires et aux pouvoirs qui les administrent.

 mesh

Swarm et réseau Mesh : chaque terminal est en même temps le routeur de tous les autres
Source: BitOnWheels


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Partie I - Trois perspectives

Perspective numérique et cartographie sémantique #2

Code de fuite

Au coeur de ces innovations, il y a la version 6 de l' Internet Protocol (IPv6) et sa capacité à délivrer une quasi infinité d'adresses, non pas seulement des adresses de machines comme IPv4, mais des adresses de groupes, sous couvert desquelles autant de collectifs plus ou moins étendus peuvent échanger de manière synchrone ou asynchrone sans l'entremise d'aucun centre physique au sens où nous l'avons défini précédemment. C'est le principe de l'IP Multicast.

La perspective temporelle actuellement à l'oeuvre (que nous pratiquons comme Monsieur Jourdain...) mutera alors en une " perspective numérique". Pourquoi "numérique"? Parce que le point de fuite de cette troisième perspective, n'est plus un point physique comme dans les deux cas précédents, mais un code - un " code de fuite" -, qui dans le cas du Multicast, est le numéro IP du groupe sous couvert duquel celui-ci peut échanger. Dit autrement, ce code de fuite est simplement le seul point commun entre tous les membres d'un groupe livré à une forme ou une autre d'interaction collective.

 GP

Générateur Poïétique: résultat de la première expérience d’ interaction collective synchrone acentrée sur le Multicast Backbone mondial, le 21 novembre 1996 (montage de plans successifs). Source: poietic-generator.net

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Partie I - Trois perspectives

Perspective numérique et cartographie sémantique #3

Référentiel auto construit

Après que la perspective temporelle a décorrélé le temps et l'espace, en donnant corps à un temps subjectif construit par l'activité collective, la perspective numérique fait de l'espace une valeur émergeant de la même manière. Les terminaux mobiles (ou pas) qui sont aussi les routeurs du réseau, se "voient" les uns les autres et peuvent se localiser de proche en proche par triangulation. Chacun est ainsi en mesure d'établir la carte de tous les autres selon un point de vue qui lui est propre.

La perspective numérique ouvre ainsi la voie à un troisième type de cartographie que l'on pourrait qualifier de " cartographie sémantique".

Selon un principe d'auto géo localisation, le référentiel peut être auto construit en flux tendu à l'intérieur du réseau. Le cas échéant, il peut reproduire la géographie physique, mais aussi toutes sortes d'autres géographies sémantiques propres aux échanges humains et machiniques ainsi qu'à leur environnement.

 WifiUSA

Carte des réseaux sans fil des USA
Source : Cybergeographe


La cartographie sémantique apparaît donc comme d’une importance déterminante pour le développement des réseaux acentrés. C’est grâce à elle que pourront émerger des échanges les structures permettant de s’y repérer.

 FA

Agrégateur Poïétique et Agrégateur fractal?: cartographie sémantique d’un collectif dispersé échangeant sous couvert d’un ensemble de tags (codes).
Source : ANOPTIQUE


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Partie I - Trois perspectives

Perspective numérique et cartographie sémantique #4


 infoscape.jpg

Datapainting / Infoscape / Parcours#1 (identités).
Source : Yann Le Guennec


Temps codal

Dès aujourd’hui, des prototypes de moteurs de recherche et d’environnements virtuels distribués (Wuala, TerraNet, NaviZon, Solipsis, @rbre+jMaay, etc.) annoncent des nouveaux modèles concurrents de leurs équivalents centralisés (Google, SecondLife, Facebook, etc).

La perspective numérique annonce donc à son tour une perte d'influence des centres de la perspective temporelle aujourd’hui dominants au profit de nouveaux.

La nature de ces nouveaux centres est tout à fait paradoxale. En principe, ce sont des codes, c’est à dire des entités qui n’ont pas de rapport avec le temps et l’espace. Or ces codes, de nature arbitraire, sont nécessairement attribués ou déterminés suivant des procédures qui résultent de choix et qui prennent logiquement la forme de programmes et de logiciels. Ces logiciels sont écrits par des humains qui eux, sont situés quelque part. Et ces programmes peuvent aussi changer suivant les choix que font les humains en question. Bref, le " code de fuite" a toujours partie liée avec le temps et l’espace.

Le temps subjectif émergeant de l’interaction serait ainsi tributaire d’un temps agissant en amont, que l’on pourrait appeler un " temps codal", c’est à dire qui serait la conséquence des changements de modalités du code (ex: le passage d'une version à une autre d'un programme).

Le lieu du code de fuite serait lui, distribué, ou discrétisé, suivant la localisation de tous ceux qui, à un degré ou à un autre, conditionnent ses changements: " industries du code" ou " communautés du code".


 LinuxTimeLine.jpg

Linux timeline: carte des distribution de Linux et de leur mises à jour.
Source : Distro


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Fin de la partie I

Parties II - Trois régimes de légitimité

Parties II - Perspective et territoire

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